Loi n°2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé
La loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé consacre son titre III au numérique en santé. Ce titre repose sur trois piliers. Le chapitre I est consacré à l’innovation par la valorisation des données cliniques (Health data Hub), le deuxième à l’ENS (espace numérique santé, DMP), le troisième au déploiement de la télésanté (télémédecine et télésoins et e-prescription).
La plateforme de données de santé (GIP) ou Health Data Hub se substitue à l’Institut national des données de santé (INDS), il est notamment chargé de veiller à la qualité des données de santé et aux conditions générales de leur mise à disposition, garantissant leur sécurité et facilitant leur utilisation dans le respect de la loi Informatique et Liberté, d’émettre des avis sur le caractère public que présente une recherche , une étude ou une évaluation, (l’article 73 LIL); de contribuer à l’élaboration, par la Cnil, de référentiels et de méthodologies de référence au sens du b du 2° de l’article 8 la LIL. Il facilite la mise à disposition de jeux de données de santé présentant un faible risque d’impact sur la vie privée, dans les conditions prévues au II de l’article 66 de la LIL, et contribue à l’expression des besoins en matière de données anonymes et de résultats statistiques, en vue de leur mise à la disposition du public (art L 1462-1 du CSP).
Chaque usager se verra doter d’un Espace Numérique de Santé (sauf opposition de la personne ou de son représentant légal). Il est accessible en ligne et permet d’accéder à ses données administratives, son DMP, ses constantes de santé éventuellement produites par des applications ou des objets connectés, ou toute autre donnée utile à la prévention, la coordination , la qualité et la continuité des soins, l’ensemble des données relatives au remboursement de ses dépenses de santé, des outils permettant des échanges sécurisés avec les professionnels de santé
Le dossier médical partagé est ouvert automatiquement, sauf opposition de la personne ou de son représentant légal. Ce dossier est accessible aux professionnels de santé mentionnés aux articles L. 1111-15, L. 1111-16 et L. 1111-17 du code de la santé publique, sauf opposition de l’intéressé.
Les prérequis en matière d’interopérabilité
Pour être référencés et intégrables dans l’ENS, les services ou outils numériques destinés à être utilisés par les professionnels de santé et dans le cadre de l’ENS doivent être conformes aux référentiels d’interopérabilité et de sécurité élaborés par le Health data hub afin de garantir l’échange, le partage, la sécurité et la confidentialité des données de santé à caractère personnel (art L 1110-4-1 du CSP). Une procédure d’évaluation et de certification permet d’attester “la conformité d’un système d’information ou d’un service ou outil numérique en santé aux référentiels d’interopérabilité (art L 1110-4-2 du CSP).
Ils doivent également être conformes aux référentiels d’engagement éthique ainsi que les labels et normes imposés dans l’espace numérique de santé mentionnés à l’article L. 1111-13-2.CSP. Les services et outils numériques référencés ne peuvent accéder aux données de l’espace numérique de santé du titulaire qu’avec l’accord exprès de celui-ci, dûment informé des finalités et des modalités de cet accès lors de l’installation de ces services et outils, et qu’à des fins de prévention, de diagnostic, de soins ou de suivi social et médico-social, pour une durée de conservation strictement proportionnée à ces finalités. Le titulaire de l’ESN est seul gestionnaire de son espace, il peut autoriser l’accès à des professionnels de santé
Le télésoin est une forme de pratique de soins à distance utilisant les technologies de l’information et de la communication. Il met en rapport un patient avec un ou plusieurs pharmaciens ou auxiliaires médicaux dans l’exercice de leurs compétences prévues par le CSP. Les activités de télésoin sont définies par arrêté du ministre chargé de la santé, pris après avis de la Haute Autorité de santé. Cet avis porte notamment sur les conditions de réalisation du télésoin permettant de garantir leur qualité et leur sécurité ainsi que sur les catégories de professionnels y participant. « Les conditions de mise en oeuvre des activités de télésoin sont fixées par décret en Conseil d’Etat”. Les activités de télésoin prises en charge par l’assurance maladie mettent en relation un auxiliaire médical et un patient et sont effectuées par vidéotransmission. Leur prise en charge est subordonnée à la réalisation préalable, en présence du patient, d’un premier soin par un auxiliaire médical de la même profession que celle du professionnel assurant le télésoin. Les activités de télésoin prises en charge par l’assurance maladie mettent en relation un pharmacien et un patient et sont effectuées par vidéotransmission. Leur prise en charge est subordonnée à la réalisation préalable par un pharmacien, en présence du patient, d’un premier soin, bilan de médication ou entretien d’accompagnement d’un patient atteint d’une pathologie chronique. Les activités de télé-soin seront définies “par arrêté du ministre chargé de la santé, après avis de la Haute autorité de santé (HAS)”, lequel devra mentionner “les conditions de réalisation du télésoin garantissant leur qualité et leur sécurité ainsi que sur les catégories de professionnels y participant”. Leurs conditions de mise en oeuvre seront fixées par décret en Conseil d’Etat.
L’article 55 habilite le gouvernement à prendre des ordonnances afin de généraliser par étapes la prescription électronique (e-prescription) d’ici 2021, conformément à la stratégie “Ma santé 2022”. Ces ordonnances pourront également porter sur les “règles relatives aux conditions de certification des logiciels d’aide à la prescription et à la dispensation (LAP/LAD), tout en assurant la sécurité et l’intégrité des données, en vue de généraliser par étapes la prescription électronique”.

*Texte n° 245 adopté par l’Assemblée nationale le 26 mars 2019
Les différentes composantes de l’e-santé
Le terme e-Health serait né fin 1999 à l’occasion de la présentation d’une étude australienne, lors du 7e congrès international de télémédecine. Son auteur, John Mitchell, l’a alors défini comme « l’usage combiné de l’internet et des technologies de l’information à des fins cliniques, éducationnelles et administratives, à la fois localement et à distance »
La loi de modernisation du système de santé du 26 janvier 2016 a permis la création du Système National des Données de Santé (SNDS) et la réforme du Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT)
LE SNDS
La France a été l’un des premiers pays à se doter d’une base nationale de données médico-administratives qui centralise les données de description de parcours des soins utiles au remboursement. Le SNDS (Système National des Données de Santé) est entré en vigueur depuis le 3 avril 2017. Il regroupe les principales bases de données de santé publique existantes. Hérité du SNIIRAM (système national d’information inter-régime de l’Assurance maladie), il regroupe le PMSI , programme de médicalisation des systèmes d’information (ATIH), le CépiDC (Inserm), MDPH (maison départementale des personnes handicapées), AMC (remboursement complémentaire). Les données collectées sont relatives à la consommation de soins de ville, la consommation de soins en établissement (hôpitaux, cliniques,…), aux actes et consultation externes des hôpitaux publiques, aux offres de soins, aux bénéficiaires de l’assurance maladie (tous régimes)

Le SDN permet l’ouverture des données de santé dans le respect de la vie privée du citoyen et l’amélioration de la santé des populations et l’analyse de la dépense publique. Il centralise, enrichi et met à la disposition de manière sécurisée les données en santé. L’accès est encadré par la Cnil et l’INDS (institut des données de santé). L’INDS est le « guichet unique » pour orienter les demandes d’autorisation d’accès aux données de santé. La loi a clarifié les conditions d’utilisation du numéro de sécurité sociale, le NIR, dans le cadre de recherches et a confirmé le droit d’utiliser le NIR pour des recherches dans le domaine de la santé.

Source : IFERISS, SNDS et EGB : Bases de données médico-administratives : Accessibilité et structure de ses données, par Thi Hoang Diem Vuillemenot
Le patient au coeur de la transformation digitale du système de sant
*Article L1461-1 et suivants du CSP/
* Décret n° 2016-1871 du 26 décembre 2016 relatif au traitement de données à caractère personnel dénommé « système national des données de santé » , JORF n°0301 du 28 décembre 2016 texte n° 33 Délibération n° 2016-316 du 13 octobre 2016 portant avis sur un projet de décret en Conseil d’Etat relatif au Système national des données de santé (demande d’avis n° 16018114), JORF n°0301 du 28 décembre 2016, texte n° 147 /
Arrêté du 22 mars 2017 relatif au référentiel de sécurité applicable au Système national des données de santé , JORF n°0071 du 24 mars 2017 texte n° 28
LE GHT
La loi de 2016 a instauré le groupement hospitalier de territoire (GHT) en lieu et place des communautés hospitalières de territoire. Il constitue une nouvelle forme de coopération conventionnelle fondée sur une adhésion obligatoire des établissements publics de santé. Cette coopération vise à rationaliser les modes de gestion soit par une mise en commun des fonctions, soit par des transferts d’activités entre établissements. Les GHT devront élaborer un projet médical partagé. En ce qui concerne les SI, l’objectif vise à constituer progressivement un SI unique pour l’ensemble du GHT.
Ma Santé 2022 : Stratégie de transformation du système de Santé
La stratégie e-santé 2020 a permis de fixer les grandes priorités et orientations stratégiques. Il manque à ce jour un schéma d’architecture cible des Systèmes d’Information en santé, assorti d’un schéma d’urbanisation fonctionnel et technique fixant un cadre légal global et opposable qui permettrait d’aligner l’ensemble des acteurs. Les acteurs sont peu coordonnés. Il manque une structuration de la gouvernance, autour du numérique, ainsi qu’un manque de directives claires.
Le 18 septembre 2018, le Président de la République et la Ministre des Solidarités et de la Santé ont présenté Ma Santé 2022, une transformation du système de santé en 10 chantiers. « Recourir au numérique pour mieux soigner » est l’un d’entre eux. Les défis de la révolution numérique sont nombreux, inédits et interdépendants. Aux défis stratégiques, s’ajoutent les défis techniques. L’amélioration de la structuration de la donnée est nécessaire. Une donnée n’a pas la même signification en fonction du contexte. Des progrès sont nécessaires sur l’interopérabilité sémantique pour permettre l’exploitation des données, sur l’interprétation et la validation des algorithmes en médecine….Les données doivent être protégées et décloisonnées…..
Gouvernance de l’e-santé : DNS-ANS-CN
Mission de l’ANS : La gouvernance de l’interopérabilité sémantique des données de santé a été définie comme une priorité pour la future Agence du numérique en santé, dont la création est prévue pour décembre 2019.
Mission de la DNS : Définir la politique du numérique en santé, garantir la cohérence au travers de ses arbitrages, soumettre annuellement à la ministre une feuille de route et les budgets associés, coordonner l’ensemble des acteurs institutionnels nationaux et régionaux, superviser le pilotage de l’ensemble des chantiers de transformation numérique en santé.
Mission du CNS : Le Conseil du Numérique en Santé : Au sein du CNS, la Ministre a décidé de constituer une « cellule rassemblant des experts de l’éthique du numérique ». Cette cellule aura pour mission « de faire de l’éthique un élément central du virage numérique en santé, notamment grâce à l’élaboration d’outils pratiques de sensibilisation, d’évaluation et de labellisation à destination des professionnels de santé, des industriels, des usagers et des pouvoirs publics ».Elle sera, selon la Ministre, “garante d’un cadre de valeurs humanistes en faisant le lien avec les instances existantes, notamment le Comité consultatif national d’éthique [CCNE]”. La prochaine réunion du CNS est prévue pour le 27 juin et sa périodicité sera « semestrielle ».
Pour aller plus loin sur le projet de loi “relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé” et tout particulièrement au Titre III : “Développer l’ambition numérique en santé”
Adoption du projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé par le Sénat, par Eléonore Scaramozzino, Avocat
Projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé : Position de la Commission des Affaires Sociales du Sénat sur l’ENS, Eléonore Scaramozzino, Avocat