Covid-19 : le recours nécessaire à la Téléconsultation

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Chloe Picavez, Juriste et Eléonore Scaramozzino, Avocat

mise à jour du 26.03.2020.

L’avenant 6 à la convention médicale signé par les partenaires conventionnels le 14 juin 2018, et approuvé par arrêté ministériel du 1er août 2018, permet ainsi l’admission au remboursement de droit commun par l’assurance maladie des actes de téléconsultation à compter du 15 septembre 2018 et de téléexpertise à compter du 10 février 2019 (décret n°2018-788 du 13 septembre 2018).

Le Covid-19 favorise le recours à la téléconsultation, pour soigner tout en limitant les risques de propagation du virus. La télémédecine est une « forme de pratique médicale à distance utilisant les technologies de l’information et de la communication » (art. L.6316-1, Code de la Santé publique CSP). Elle comprend 5 actes (téléconsultation, téléexpertise, télésurveillance, téléassistance et régulation médicale (décret n°2010-1229 du 19 octobre 2010). La téléconsultation est une consultation réalisée via les technologies de l’information et de la communication entre un professionnel médical « téléconsultant » et un patient, lequel peut ou non être accompagné par un professionnel de santé. L’opportunité du recours à la télémédecine doit relever, dans le régime actuel, d’une appréciation au cas par cas des médecins, qui jugent de la pertinence d’une prise en charge médicale à distance plutôt qu’en présentiel. La téléconsultation s’inscrit ainsi dans un cadre assurant une prise en charge de qualité et respectueuse des principes d’organisation du système de soins. Le patient doit être informé des conditions de réalisation de la téléconsultation et avoir donné son consentement préalable à la réalisation de l’acte.

Pour pouvoir être pris en charge par l’Assurance Maladie, l’acte de téléconsultation repose sur deux exigences techniques : (i) le recours obligatoire à un échange vidéo (vidéotransmission) pour garantir les conditions garantissant la qualité de la consultation, la confidentialité et la sécurité des échanges conformément à l’article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale et (ii) la connexion à une solution sécurisée.

Les actes de téléconsultation sont remboursés par l’Assurance Maladie, sous réserve de répondre aux grands principes cumulatifs posés dans l’avenant 6 à la convention médicale 1) la téléconsultation doit s’inscrire dans le respect du parcours de soins coordonné avec orientation préalable du médecin traitant, 2) les patients doivent être connus du service du téléconsultant (consultation en présentiel dans les 12 mois précédant la téléconsultation) afin de pouvoir disposer des informations nécessaires à un suivi de qualité ; ce suivi implique également une alternance nécessaire de consultations en présentiel et de téléconsultations (consultation en présentiel nécessaire au cours des 12 derniers mois précédant chaque téléconsultation).

Coronavirus & Téléconsultation : régime dérogatoire jusqu’au 30 avril 2020

Le Décret n° 2020-227 du 9 mars 2020 adaptant les conditions du bénéfice des prestations en espèces d’assurance maladie et de prise en charge des actes de télémédecine pour les personnes exposées au Covid-19, facilite le recours à la téléconsultation jusqu’au 30 avril 2020. Le décret détermine notamment les conditions dérogatoires de prise en charge des actes de télémédecine pour les personnes atteintes ou potentiellement infectées par le coronavirus, qui pourront en bénéficier même si : i) elles n’ont pas de médecin traitant pratiquant la téléconsultation, ii) ni été orientées par lui, iii) ni été connues du médecin téléconsultant. Cet assouplissement des conditions d’accès à un médecin pour les personnes présentant les symptômes du virus, doit être salué dans un contexte sanitaire marqué par la propagation du coronavirus, même si, selon les médecins, les symptômes respiratoires du Covid-19 nécessitent une auscultation du patient . Un accompagnement par un professionnel de santé (infirmière/infirmier libéral(e) au domicile, pharmacien(ne) d’officine à la pharmacie, infirmière/infirmier à l’Ehpad) assistant le professionnel médical pendant la téléconsultation, permettrait d’optimiser la pratique médicale à distance. En effet, s’il existe des signes respiratoires chez une personne âgée, il faut que cette téléconsultation se déroule en présence d’un professionnel de santé qui permettra au médecin de réaliser une auscultation pulmonaire à distance grâce à un stéthoscope connecté que le professionnel de santé promènera sur le thorax, à la demande du médecin. La prise de la saturation du sang en oxygène, avec un capteur au doigt, sera également très utile pour évaluer la sévérité des troubles respiratoires, ainsi que la collecte d’autres paramètres physiologiques comme le rythme cardiaque, la tension artérielle, la température, etc… Le cadre juridique et financier pour réaliser des téléconsultations assistées est en place, bien avant la survenue de l’épidémie du Covid-19. Les pharmaciens d’officine sont rémunérés pour assister un patient en téléconsultation avec son médecin traitant depuis septembre 2019 (arrêté du 2 septembre 2019 portant approbation de l’avenant n° 15 à la convention nationale du 4 mai 2012, organisant les rapports entres les pharmaciens titulaires d’officine et l’assurance maladie), et l’infirmier ou l’infirmière libéral(e) est rémunéré depuis le 1er janvier 2020 (avenant 6 de la convention infirmière).

Extension du régime dérogatoire au télésoin : Décret no 2020-277 du 19 mars 2020 modifiant le décret no 2020-73 du 31 janvier 2020 portant adoption de conditions adaptées pour le bénéfice des prestations en espèces pour les personnes exposées au coronavirus

Le télésoin est une forme de pratique de soins à distance utilisant les technologies de l’information et de la communication. Il met en rapport un patient avec un ou plusieurs pharmaciens ou auxiliaires médicaux dans l’exercice de leurs compétences (Article L6316-2 du Code de la santé publique). Le régime dérogatoire relatif aux activités de télémédecine est étendu aux activités de télésoin réalisées par les infirmiers pour les personnes dont le diagnostic d’infection à covid-19 a été posé cliniquement ou biologiquement. Le remboursement par l’assurance maladie à un infirmier libéral ou une structure de soin de l’art L 162-14-1 CSS dérogent aux conditions de droit commun ( « la connaissance préalable du patient par une première consultation en présentiel avec l’infirmier, et le matériel nécessaire à la vidéotransmission) . L’activité de télésoin pourra être effectuée par téléphone. Le présent décret prévoit également une exonération du ticket modérateur sur les téléconsultations réalisées pour les personnes dont le diagnostic d’infection à covid-19 a été posé ou suspectées de l’être ainsi que pour les actes de télésuivi infirmier. Ce régime dérogatoire est mis en œuvre jusqu’au 31 mai 2020.L’ordre infirmier s’en félicite, cette mesure ayant en effet été demandé dans le cadre de ses 7 mesures d’urgence pour lutter efficacement contre le coronavirus.

Arrêté du 23 mars 2020 prescrivant les mesures d’organisation et de fonctionnement du système de santé nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire

L’article 4 de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 a déclaré l’état d’urgence pour une durée de deux mois. L’arrêté du 23 mars 2020 fixe les mesures d’organisation et de fonctionnement du système sanitaire mentionnées à l’article L. 3131-16 du code de la santé publique. Sauf disposition contraire du présent arrêté, ces mesures sont applicables jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire. L’arrêté rappelle que « Les professionnels de santé assurant la prise en charge par télésanté des patients suspectés d’infection ou reconnus covid-19 recourent à des outils numériques respectant la politique générale de sécurité des systèmes d’information en santé et la réglementation relative à l’hébergement des données de santé ou, pour faire face à la crise sanitaire, à tout autre outil numérique » (art 8).

Télésuivi infirmier : Les infirmiers peuvent assurer le télésuivi, c’est-à-dire la surveillance clinique par vidéotransmission ou téléphone des patients suspectés d’infection ou reconnus atteints du codiv-19. La valorisation du télésuivi est à hauteur d’un AMI 3.2 par les infirmiers libéraux ou les structures mentionnées à l’article L 162-1-7 code de la sécurité sociale.

Téléconsultation pour les sages-femmes : Pour les téléconsultations réalisées par les sages-femmes, ces dernières sont valorisées à hauteur d’une téléconsultation simple (code TCG). Le code TCG permet aux professionnels de santé téléconsultants en secteur à honoraires opposables [secteur 1] ou en secteur à honoraires différents [secteur 2] adhérant aux dispositifs de pratique tarifaire maîtrisée de facturer l’acte de téléconsultation à 25 euros. L’avenant n°6, entré en vigueur le 15 septembre 2018, détaille le montant des rémunérations prévues pour les professionnels de santé et les conditions à respecter pour bénéficier d’un remboursement de droit commun des actes de téléconsultation et de télé-expertise.

Extension du régime dérogatoire à la Télésurveillance des patients insuffisants cardiaques chroniques ( patients à risque) : Les patients éligibles à un projet de télésurveillance mis en œuvre sur le fondement de l’article 54 de la loi FSS du 30 décembre 2017 pour 2018 (prorogation de 4 ans du programme Expérimentations de financement de la télémédecine pour l’amélioration des parcours en santé (2018-2022), ne sont pas soumis à l’obligation de satisfaire l’une des deux conditions suivantes : 1/ Hospitalisation au cours des 30 derniers jours pour une poussée d’insuffisance cardiaque chronique (diagnostic principal, au regard du compte rendu ou du codage CIM 10 – I500/I501/I502/I509); 2/ Hospitalisation au moins une fois au cours des 12 derniers mois pour une poussée d’insuffisance cardiaque chronique (diagnostic principal, au regard du compte rendu ou du codage CIM 10 – I500/I501/I502/I509) et actuellement en classe NYHA 2 ou plus avec un taux de peptides natriurétiques élevé (BNP >100 pg/ml ou NT pro BNP >1000 pg/ml). Dans son avis du 14 mars 2020, le Haut Conseil de la Santé publique (HCSP), à la demande de la direction générale de la santé, avait listé les personnes à risque de développer des formes sévères de Covid-19

Absence de précision sur les conditions techniques des téléconsultations pour le covid-19 ?

Si ces téléconsultations devront s’inscrire prioritairement dans le cadre d’organisations territoriales coordonnées, le décret ne traite pas des conditions techniques. Le gouvernement explique dans une notice que ces dernières pourront être réalisées en utilisant n’importe lequel des moyens technologiques actuellement disponibles pour réaliser une vidéotransmission (lieu dédié équipé mais aussi site ou application sécurisé via un ordinateur, une tablette ou un smartphone, équipé d’une webcam et relié à internet. Le ministre des Solidarités et de la Santé a cité comme exemple Facetime (Apple) et WhatsApp (Google) pour réaliser des téléconsultations. Cependant, ces plateformes ne sont pas sécurisées et ne permettent pas de transmettre des ordonnances cryptées, facturer le patient, télétransmettre à la caisse d’assurance maladie (CNAM) …..

Au regard de la protection des données de santé, cette ouverture aux GAFAM a suscité diverses craintes, dans la mesure où les conditions de sécurité imposées aux opérateurs de téléconsultation ne sont pas satisfaites (hébergement HDS, secret médical …principe de finalité, conservation des données) par ces plateformes. Dans son communiqué de presse la Société Française de Santé Digitale, SFSD, a rappelé que « la coordination des soins, l’usage de dispositifs médicaux connectés (mesure de la saturation en oxygène, stéthoscope électronique, thermomètre ou le tensiomètre) et le respect absolu du secret médical restent indispensables pour obtenir des téléconsultations utiles au diagnostic des formes cliniques graves d’infection au Covid-19 (tableau clinique de bronchopneumopathie)… »

Protection des données de santé vs « bénéfice-risque » ?

Face à l’urgence, le gouvernement a opté pour l’approche « bénéfice / risque » utilisée en médecine, et a choisi de faciliter le recours à la télémédecine, qui peut apporter une réponse pour réduire le risque de contagion et orienter au mieux les patients. Le CNOM est satisfait de cette solution transitoire car l’épidémie légitime de telles mesures. La rémunération des médecins sera la même que s’il s’agissait d’une consultation. La Cnil n’a pas été consultée préalablement à la publication de ce décret, qui instaure un régime dérogatoire limité au 30 avril 2020. Elle pourra néanmoins procéder à des contrôles conformément à sa stratégie de contrôle 2020, axée sur 3 thématiques : Sécurité des données de santé, Mobilités et services de proximité, les nouveaux usages des données de géolocalisation, et respect des dispositions applicables aux cookies et autres traceurs. La Cnil précise que « Les données de santé sont des données sensibles, qui font l’objet d’une protection spécifique par les textes (RGPD, loi Informatique et Libertés, Code de la santé publique, etc.) afin de garantir le respect de la vie privée des personnes. La CNIL souhaite, grâce à cette thématique prioritaire, s’intéresser plus particulièrement aux mesures de sécurité mises en œuvre par les professionnels de santé ou pour leur compte. »

La réponse de l’écosystème au décret du 10 mars : les solutions sécurisées de téléconsultation en libre accès

Des solutions technologiques sécurisées existent et permettent de contourner la salle d’attente tout en protégeant les données de santé. L’ARS Ile-de-France a renforcé son dispositif régional de télémédecine, Ortif, en généralisant la téléconsultation directe patient. Cette initiative fait suite au décret du 10 mars facilitant la prise en charge des actes de télémédecine. Ce dispositif est dédié à l’ensemble des adhérents du SESAN. L’ARS Île-de-France, SESAN et NEHS Digital (titulaire du marché régional ORTIF), se sont mobilisés pour activer ce dispositif en 48 h. Ce dispositif, financé par l’ARS Île-de-France, est mis à disposition pour toute la durée de la situation de crise Covid-19. e-Kermed, l’offre régionale de santé Bretagne et piloté par la GCS e-Santé Bretagne, propose gratuitement pendant l’épisode de crise COVID-19, aux professionnels de santé, une solution de visioconférence médicale adaptée au contexte de la téléconsultation. L’ARS Normandie met à la disposition gratuitement la plate-forme régionale de télémédecine Therap’e, administrée par le Groupeent Normand’eSanté. Doctolib a été la première start-up à proposer à tous les médecins et patients de France d’utiliser son outil de téléconsultation gratuitement en mars et avril pour répondre à la propagation du coronavirus… Hellocare offre également son service de téléconsultation pendant la durée de l’épidémie, aux médecins qui veulent intégrer la téléconsultation dans leur mode de prise en charge…Face à l’épidémie, la French Tech se mobilise pour limiter la propagation du virus. Dans le cadre du projet COVID-TELE de l’Institut Pasteur de triage en amont du parcours patient COVID-19, la start-up Kelindi a lancé son application gratuite qui permet à toute personne qui pense avoir été exposée au Coronavirus d’effectuer un test en ligne. Conçue en Privacy-By-Design, son utilisation sera analysée dans le cadre d’une étude épidémiologique après consolidation des données dans le cadre du HealthDataHub.

Grande souscription nationale pour la création d’un fond de solidarité dédié au déploiement de la télémédecine lancée par l’Académie Francophone de Télémédecine

L’Académie Francophone de Télémédecine et de e-Santé, société savante et pionnière de la télémédecine propose, suite au décret n’2020-227 du 9 mars 2020 et de la crise sanitaire actuelle du COVID-19, une grande souscription nationale pour créer un fond de solidarité dédié à la télémédecine en France.L’ensemble des acteurs scientifiques et institutionnels de l’Académie Francophone de Télémédecine et de e-santé se mobilisent pour accompagner les pouvoirs publics dans la mise en oeuvre de cette souscription nationale en échos à l’épidémie de coronavirus. Cette initiative doit être accompagnée par le lancement d’un grand chantier national « Zéro Déserts Médicaux» qui repose sur un principe clé : « que n’importe quel citoyen, même dans les endroits les plus isolés, ait une réponse, en moins de 30 minutes, à sa question angoissante « Mais qu’est-ce-que j’ai ? » avec une prise en charge digne de ce nom ». Ce chantier reposant sur un plan quinquennal Haute Sécurité Santé permettrait de mailler le territoire encadré par une démarche certifiée HS2 (Haute Sécurité Santé). Son pilotage organisé en FIAT Force d’Intervention et d’Appui à la Télémédecine serait relayé par les préfets dans une démarche d’aménagement du territoire ce qui permettrait de trouver les solutions concrètes les plus adaptées à chacune des régions concernées en concertation avec les élus, les Industriels, les starts up et les professionnels et acteurs du monde de la santé et de l’action sociale comme le secteur de l’Assurance et des Mutuelles ayant déjà manifesté un soutien efficace. L’académie en lien direct avec tous les organismes médicaux et publics se veut coordinateurs de ce déploiement et va mobiliser l’ensemble des services publiques pour lancer cette souscription nationale. Ajoutez un 5ème P, celui de la proximité à la Médecine 4P ( Personnalisée, Préventive, Participative et Prédictive), selon Ghislaine Alajouanine, MC Institut de France, Présidente de l’Académie Francophone de Télémédecine et de e-santé, société savante. Organisée en « Task Force », cette institution a vocation de rendre des avis consultatifs et à donner des orientations stratégiques à la disposition des instances officielles.

De la téléconsultation au télésuivi des personnes infectées ou suspectées d’infection par le Covid-19

AP-HP et Nouveal e-santé

Le 9 mars, l’AP-HP et Nouveal e-santé ont lancé dans les hôpitaux Bichat et Pitié-Salpêtrière, deux établissements de santé de référence (ESR) pour le Covid-19 de l’AP-HP, une application destinée au suivi médical à domicile des patients infectés ou suspectés d’infection par le Covid-19, qui ne nécessitent pas d’hospitalisation. L’application gratuite COVIDOM, permet à ces patients ne présentant pas de signes de gravité de bénéficier d’un télésuivi à domicile via des questionnaires médicaux proposés une ou plusieurs fois par jour, en complément des mesures de confinement. Le patient est enregistré sur la plateforme par un médecin (connexion à la plateforme, inscription du patient en saisissant ses données administratives et les données médicales utiles), et bénéficie d’un identifiant et d’un mot de passe uniques. Au sein de l’app, le patient est interrogé sur son niveau de température ou sur une possible gêne respiratoire. La fréquence du questionnaire est variable en fonction de la stratification du risque et de la période). En cas de signes alarmants, il est précisé que “l’équipe soignante est alertée et contacte le patient pour éventuellement adapter le suivi et la prise en charge”. Le suivi des patients inclus dans Covidom s’effectue depuis un centre de télésurveillance médicale. Comme le précise l’AP-HP dans son communiqué de presse « Cet outil constitue une réponse adaptée qui va par ailleurs nourrir les travaux en cours pour l’accompagnement de la prise en charge des patients en ville« . Le CHU de Rennes a mis en place un service de télésuivi gratuit SIH Solutions.Le patient est enregistré sur la plateforme par un médecin (connexion à la plateforme, inscription du patient en saisissant ses données administratives et les données médicales utiles), et bénéficie d’un identifiant et d’un mot de passe uniques. Au sein de l’app, le patient est interrogé sur son niveau de température ou sur une possible gêne respiratoire. La fréquence du questionnaire est variable en fonction de la stratification du risque et de la période). En cas de signes alarmants, il est précisé que “l’équipe soignante est alertée et contacte le patient pour éventuellement adapter le suivi et la prise en charge”. Le suivi des patients inclus dans Covidom s’effectue depuis un centre de télésurveillance médicale. Comme le précise l’AP-HP dans son communiqué de presse « Cet outil constitue une réponse adaptée qui va par ailleurs nourrir les travaux en cours pour l’accompagnement de la prise en charge des patients en ville« . Le CHU de Rennes a mis en place un service de télésuivi gratuit SIH Solutions.

La plateforme d’accompagnement personnalisé CoviDIAB :

CoviDIAB est un programme personnalisé d’accompagnement en ligne pour les diabétiques en période d’épidémie COVID-19. Ce programme est animé par des médecins et soignants hospitaliers, et soutenu par l’AP-HP et des équipes de recherche INSERM. L’application permet de réaliser son parcours personnalisé, recevoir des messages, consulter sa médiathèque de médias (vidéos, fiches conseil…) L’application constitue un véritable lien interactif avec les soignants, et une source fiable et actualisées d’informations validées . Cette application e-santé est proposée par la Fédération des Services Hospitaliers de Diabétologie (Hôpital Bichat, Pr Roussel ; Hôpital Cochin, Pr Larger, Hôpital Lariboisière, Pr Gautier) et le Centre de Responsabilité de Santé Connectée de l’AP-HP (Dr Boris Hansel, Pr Patrick Nataf)

Faciliter l’accès aux solutions de téléconsultation et télésuivi pour prendre en charge des atteints de COVID-19

Le référencement par le Ministère sous la responsabilité des éditeurs de solutions

Le Ministère des Solidarités et de la Santé encourage les médecins et infirmiers à s’équiper en solutions de téléconsultation et de télésuivi pour prendre en charge des atteints de COVID-19. A cet effet, il a référencé les solutions disponibles en télésanté avec, pour chacune, les fonctionnalités proposées et le niveau de sécurité garanti. Cette liste est établie à partir d’une auto-déclaration par les éditeurs de solutions, qui engagent ainsi leur responsabilité. Il est précisé que « Ces solutions numériques recouvrent tout aussi bien des logiciels, des plateformes, des accès web, des applications spécifiques permettant un acte médical ou une activité de soin à distance. » . Cette liste n’est pas exhaustive et tout éditeur peut être recensé via un formulaire https://telemedecine-covid19.esante.gouv.fr/ Par ailleurs, le site du Ministère impose aux professionnels de santé d’utiliser des outils (qu’ils soient référencés ou non), « respectant le règlement général sur la protection des données (RGPD), la réglementation relative à l’hébergement des données de santé (HDS) et la politique générale de sécurité des systèmes d’information en santé (PGS-SIS). Toutefois, en cas d’impossibilité et exclusivement dans le cadre de la réponse à l’épidémie de COVID-19 les professionnels peuvent utiliser d’autres outils (arrêté en cours de parution) » .

Les critères d’évaluation :

Les informations concernant la sécurité ont été regroupées en un indicateur : score de sécurité sur 10 points. L ’objectif est de garantir aux patients que leur prise en charge dans le cadre d’une activité de télémédecine est assurée avec une qualité et une sécurité au moins équivalentes à celles d’une prise en charge classique.

Le cadre réglementaire de la téléconsultation

Information & Consentement : articulation RGPD et réglementation de la télémédecine

Le patient doit être informé de tous les aspects de sa prise en charge (article L.1111-2 du Code de la santé publique). Une information spécifique portant sur le procédé de télémédecine doit être intégrée à l’information du patient. Ainsi, la distanciation créée par la téléconsultation suppose que le patient soit clairement informé des rôles et identités des professionnels, de ce qui est vu à distance, de ce qui est enregistré, pour combien de temps et pour quel usage, des risques spécifiques inhérents à ce type d’acte et de la différence avec une prise en charge classique, etc. Le rôle de chacun des intervenants dans le dispositif de prise en charge doit avoir été préalablement décrit, sous forme de protocoles ou procédures de soins, auxquels le patient doit pouvoir avoir accès lorsqu’il le souhaite. Cette information spécifique du patent imposée par la réglementation de la télémédecine est différente du droit à l’information du RGPD (art 12) et des mentions d’information obligatoire de l’art 13. Cette information se superpose à l’information du RGPD. En outre, les « outils » de téléconsultation doivent prévoir une procédure de recueil du consentement du patient. En effet les actes de télémédecine sont réalisés avec le consentement libre et éclairé de la personne (art L 111-4 CSP). (art R-6316-2 CSP).

L’hébergement des données de santé générées par l’acte de téléconsultation : un hébergement spécifique des données de santé

L’hébergement HDS est réalisé après que la personne prise en charge en a été dûment informée et sauf opposition pour un motif légitime (art L 1111-8-I du CSP). Tout hébergement de données de santé effectué par un réseau de télémédecine doit être certifié HDS. L’hébergement des données de santé se pose avec acuité lorsqu’une téléconsultation nécessite l’avis d’un expert et donc d’une téléexpertise. La téléexpertise a pour objet de permettre à un professionnel médical de solliciter à distance l’avis d’un ou plusieurs professionnels médicaux en raison de leurs formations ou de leurs compétences particulières, sur la base des informations médicales liées à la prise en charge d’un patient.

Les données de santé résultant de la téléconsultation sont transmises dans le cadre de la téléexpertise au Médecin requis par le Médecin requérant. Les deux médecins sont dans des établissements de santé différents.

Option n°1 : Patient du médecin requérant

Si le médecin requis conserve les données de santé résultant de la téléconsultation et transmises dans le cadre de la téléexpertise, pour le compte de l’établissement du Médecin requérant, responsable de traitement, l’établissement de santé du médecin requis est qualifié d’hébergeur, au sens de l’article L 1 111-8 du CSP. La téléexpertise peut s’effectuer soit en temps réel, en présence du patient près du médecin requérant, soit en temps différé sans la présence du patient. Le médecin requis doit inscrire le compte-rendu de la réalisation de l’acte ainsi que les actes et prescriptions médicamenteuses effectuées dans le cadre de l’acte de télémédecine (art R-6316-4 CSP) dans le DMP. Dans le cadre de la téléexpertise stricto sensu, le médecin requis intervient en présence du patient après recueil du consentement à l’acte de télémédecine (art R 6316-2 du CSP). Il devient un acteur à part entière de la prise en charge médicale du patient. Il assume la responsabilité inhérente à sa participation à l’acte, sur la base des informations transmises. Si l’intervention du médecin requis est différée, la téléexpertise se rapproche du second avis, pour répondre à des interrogations sur une situation complexe ou conforter une prise de décision médicale. Le consentement du patient n’est pas requis, Par contre, l’information du patient a posteriori est nécessaire et fait partie des bonnes règles de communication entre un médecin et un patient. Cette forme de téléexpertise ne doit pas être confondue ou assimilée au deuxième avis, pris par le patient lui-même auprès d’un autre médecin.

Option n°2 : Patient commun :

Si le médecin requis intervient dans le cadre d’une prise en charge d’un patient commun, il n’est pas hébergeur. Les données de santé résultant de la téléconsultation sont transmises dans le cadre de la téléexpertise au Médecin requis par le Médecin requérant. L’établissement de santé du médecin requis est responsable de traitement.

Traçabilité des actes de téléconsultation

En application de l’article R . 6316-4 du CSP, «Sont inscrits dans le dossier du patient tenu par chaque professionnel médical intervenant dans l’acte de télémédecine et dans la fiche d’observation mentionnée à l’article R. 4127-45 : 1° Le compte rendu de la réalisation de l’acte ; 2° Les actes et les prescriptions médicamenteuses effectués dans le cadre de l’acte de télémédecine ; 3° L’identité des professionnels de santé participant à l’acte ; 4° La date et l’heure de l’acte ; 5° Le cas échéant, les incidents techniques survenus au cours de l’acte »

Responsabilité civile professionnelle et responsabilité pénale

Toute activité de télémédecine  doit faire l’objet d’une assurance  en responsabilité. Les professionnels de santé qui participent à un acte de télémédecine doivent être en situation d’exercice légal de leur profession et donc couverts par une assurance en responsabilité civile professionnelle. Pour les actions indemnitaires, par lesquelles un patient cherche à être indemnisé d’un dommage, il convient de distinguer selon le statut du professionnel de santé.

1/ Responsabilité d’un professionnel de santé exerçant dans un établissement de santé public : lorsqu’un professionnel de santé bénéficiant du statut d’agent de la fonction publique hospitalière provoque par sa faute un dommage, il appartient à l’hôpital d’indemniser la victime. Cette règle se justifie par le fait qu’il est considéré que le professionnel de santé, même jouissant d’une indépendance professionnelle, a trouvé les moyens de son ac acte (et de sa faute éventuelle) dans la mission d’exécution des soins qui lui a été confiée par l’hôpital. La faute commise est ainsi une faute de service dont l’hôpital doit répondre (sauf hypothèse rare de la faute détachable des fonctions). C’est la responsabilité du centre hospitalier qui se trouverait engagée, pour un défaut d’organisation du service ou pour une faute commise par son agent, ici au titre de la télémédecine.

2/ Responsabilité d’un professionnel de santé salarié d’un établissement privé : Le professionnel de santé salarié ne peut voir sa responsabilité personnelle engagée, dès lors qu’il a agi dans le cadre des fonctions qui lui ont été confiées par l’employeur. Ce dernier doit indemniser le patient au titre des fautes ou manquements commis par le professionnel de santé salarié, sauf si le salarié ne doit pas avoir commis d’abus de fonction justifiant que sa responsabilité personnelle soit recherchée. Cette notion relativement restrictive est cependant rarement retenue par les tribunaux.

3/ Responsabilité d’un professionnel de santé exerçant à titre libéral : Les demandes financières des patients relèvent de la responsabilité personnelle du professionnel de santé et sont couvertes par son contrat d’assurance en responsabilité civile professionnelle.

La responsabilité pénale est strictement personnelle. Ainsi, chaque professionnel de santé est responsable de ses propres actes et doit répondre de ses agissements

Réglementation

Arrêté du 23 mars 2020 prescrivant les mesures d’organisation et de fonctionnement du système de santé nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire

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